Comme c’est beau le travail collaboratif! 6 internautes sceptiques ont gracieusement uni leurs efforts afin d’enfin pouvoir offrir une traduction en français de la superbe infographie basée sur le travail de Buster Benson (dont le résultat final, un superbe poster, peut être commandé en ligne en anglais ou en français). Cet article présente cette magnifique ressource en complétant avec des informations tirées du site Associations libres.

Ressource originale à consulter :
– sous forme d’infographie : cliquer sur chaque biais pour en avoir la définition ;
– sous forme de PDF (34 p., voir plus bas pour le sommaire) imprimable (à laisser traîner dans toutes les toilettes? :-D).

Notre cerveau est un organe formidable, malheureusement il est loin d’être parfait et les études sur son fonctionnement (sciences cognitives) le démontrent à foison. Confronté à des problèmes, il a mis en place des stratégies pour les résoudre, notamment des raccourcis de pensée qui sont spontanés et inconscients. Souvent très utiles, ces raccourcis peuvent parfois nous faire mal interpréter les choses. Ils sont également des leviers privilégiés pour ceux qui voudraient orienter notre interprétation.

En résumé :
1. Le trop-plein d’information est nocif, donc on filtre en masse
2. Ça ne va pas en s’arrangeant, alors on ne s’encombre que du strict nécessaire
3. Il faut agir vite pour ne pas rater son tour, alors nous sautons directement aux conclusions
4. Le manque d’information rend confus, donc on remplit les trous

Mais les solutions que nous avons trouvées pour régler les problèmes peuvent nous jouer des tours :
1. Nous ne voyons pas tout. Et certaines des informations que nous écartons/filtrons sont en fait utiles et importantes.
2. Notre mémoire renforce les erreurs. Une partie des choses dont nous nous rappelons le plus tard rendent les systèmes cités ci-dessus encore plus biaisés et plus dommageables pour nos processus de pensée.
3. Les décisions rapides peuvent être complètement nulles. Certaines des conclusions auxquelles nous sautons sont injustes, égoïstes et contre-productives.
4. Notre quête de sens peut générer des illusions. Nous imaginons parfois des détails qui ont été placés là par nos suppositions et construisons des intentions et des histoires qui n’existent pas vraiment.

Sommaire

1. Nécessité de faire le tri
Il y a tout simplement trop d’informations dans le monde, nous n’avons pas d’autre choix que d’en filtrer la quasi-totalité. Notre cerveau utilise quelques trucs simples pour choisir les bouts d’informations qui sont les plus susceptibles de finir par être utiles :
-> Nous remarquons ce qui a déjà été amorcé dans la mémoire ou ce qui est souvent répété
-> Les choses bizarres/drôles/visuellement frappantes/anthropomorphiques sont plus marquantes que celles qui ne le sont pas
-> Lorsqu’un élément change, nous le remarquons
-> Nous sommes attirés par ce qui confirme nos propres convictions
-> Nous remarquons les failles des autres plus aisément que les nôtres

2. De quoi devons-nous nous souvenir (ou pas)?
Il y a trop d’informations dans l’Univers. Nous ne pouvons nous permettre que de nous occuper des morceaux qui sont les susceptibles de nous être utiles dans le futur et nous devons constamment faire des compromis et des paris en ce qui concerne ce dont nous allons nous rappeler ou oublier. Par exemple, nous préférons généraliser plutôt que de s’occuper de cas spécifiques car cela prend moins d’espace de stockage et lorsqu’il y a vraiment trop de détails, nous en piochons quelques-uns et ignorons le reste. Ce que nous gardons est ce qui est le plus susceptible de nous servir pour les filtres du problème 1 (l’excès d’information disponible) ainsi que de nourrir ce qui nous vient à l’esprit dans le cadre du problème 4 (le besoin de sens et de remplir les blancs). Cela s’appelle auto-renforcement.
-> Nous stockons différemment les souvenirs selon la façon dont ils ont été expérimentés
-> Nous réduisons les événements et listes à leurs éléments clés
-> Nous effaçons des spécificités pour former des généralités
-> Nous modifions et renforçons quelques souvenirs après coup

3. Nécessité d’agir vite
Nous sommes contraints par le temps et l’information, et nous ne pouvons pas nous permettre de les laisser nous paralyser. Sans la capacité à agir vite face à l’incertitude, notre espèce aurait certainement disparu il y a bien longtemps. Chaque fois que survient un nouveau bout d’information, nous devons faire de notre mieux pour évaluer notre capacité à agir sur la situation, l’utiliser pour modifier nos décisions, s’en servir pour simuler ce qui pourra advenir dans le futur et, à tout le moins, travailler à modifier notre point de vue sur le monde.
-> Nous préférons les options simples en apparence et une information complète aux options complexes et ambiguës
-> Pour éviter les erreurs, nous sommes motivés à préserver notre autonomie et notre statut au sein d’un groupe et à éviter les décisions irréversibles
-> Pour accomplir des choses, nous avons tendance à terminer ce qui nous a déjà coûté en temps et en l’énergie
-> Pour rester concentrés, nous privilégions ce qui est immédiat et signifiant juste devant nous
-> Pour agir, nous devons être sûrs que nous pouvons avoir une influence et sentir que ce que nous faisons est important

4. Pas assez de sens
Le monde est très déconcertant et nous ne sommes capables que d’en percevoir une petite partie alors qu’il nous est nécessaire d’en tirer du sens afin de survivre. Une fois que le flot réduit d’information nous est parvenu, nous relions les points, comblons les blancs avec ce que nous pensons déjà savoir et mettons à jour nos modèles mentaux du monde.
-> Nous projetons notre état d’esprit et nos suppositions actuels sur le passé et le futur
-> Nous pensons savoir ce que les autres pensent
-> Nous simplifions les probabilités et les nombres pour qu’ils soient plus faciles à appréhender
-> Nous nous figurons les choses et les gens que nous apprécions ou qui nous sont familiers meilleurs que les autres
-> Nous extrapolons des attributs sur la base de stéréotypes, de généralités, et d’antécédents
-> Nous projetons des histoires et des motifs, y compris à partir de données éparses